Comment ils vivent la maladie Comment ils vivent la maladie
Le sérotype 8 du virus, arrivé en France en 2006, gagne du terrain sous l'oeil attentif de son cousin, le sérotype 1 venu d'Espagne.
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C'est avec deux mois d'avance par rapport à l'an dernier que le virus de la fièvre catarrhale ovine (FCO) a repris à la fin de juin ses pérégrinations en France. Aidé par un retard dans le planning de livraison, il n'a pas laissé le temps aux autorités sanitaires et aux vétérinaires d'achever la campagne de vaccination. Il a repris sa course de façon fulgurante, là où il s'était arrêté avec l'arrivée de l'hiver, prenant tout le monde de cours.
L'Allier, la Nièvre, la Saône-et-Loire ou encore la Sarthe ont vu le nombre de foyers exploser. Les premiers cas en Bretagne ont été signalés au cours de juillet. Le virus a repris du service sans laisser le temps au vaccin d'arriver dans ces zones que l'Agence française de sécurité sanitaire (Afssa) préconisait de vacciner en premier pour endiguer la maladie. Le ministère, à la demande de la profession, a voulu commencer par les seize départements du Nord-Est touchés par la maladie depuis 2006 et dégager des doses pour les animaux destinés aux échanges.
Deux logiques opposées
La décision du gestionnaire de risque qu'est le ministre de l'Agriculture s'oppose donc à l'approche scientifique. Mais, comme le souligne la commission des finances du Sénat dans un rapport sur la gestion de la FCO, la vaccination n'est pas seulement un outil de contrôle de la situation épidémiologique. Elle est aussi une condition à la poursuite des échanges avec certains de nos partenaires commerciaux: l'Italie dans un premier temps, et maintenant l'Espagne.
Il reste à achever la campagne de vaccination. A la demande insistante de la profession, la Direction générale de l'alimentation a mis en place courant juillet un outil de suivi des livraisons des doses dans les départements, et de leur utilisation. Les premiers résultats montrent de fortes disparités du taux de couverture des animaux, mais ces chiffres demandent à être affinés.
Témoignage: DENIS VACQUANT, naisseur à Marcillat-en-Combraille (Allier) «Nous n'avons rien gagné en engraissant nos broutards»Le 10 septembre 2007, à la foire aux broutards de Marcillat-en-Combraille, le bruit court que l'Italie menace de fermer ses frontières. Denis et son frère Laurent n'y croient pas. Ils ne se sentent pas concernés par la FCO, qui ne touche encore que le nord-est de la France. L'après-midi, ils vendent trente-quatre broutards, sous réserve qu'ils puissent partir le jeudi suivant. Le mercredi soir, ils les trient et les rentrent en bâtiment. Le lendemain, à 9 h, coup de fil du chauffeur: les exportations sont bloquées. Les broutards retournent au pré. Le 20 octobre, l'Italie n'a toujours pas rouvert ses portes. «Seule une vente sur le marché intérieur était possible, mais à 1,60 €/kg au lieu de 2,48 €/kg un mois plus tôt. Nous avons finalement décidé de les finir nous-mêmes car nous avions assez de trésorerie. Nous les avons sevrés et rentrés en bâtiment.» Une partie du troupeau passera l'hiver dehors. Le 20 février, Denis et Laurent vendent les taurillons à un poids moyen de 417 kg pour 3,32 €/kg de carcasse. «Au final, avec la flambée du prix de l'aliment et une ration à 1,68 €/j, le bénéfice est nul. Nous avons gagné 0,32 €/j sur 160 jours. Mais ce bilan ne prend pas en compte le surcroît de travail. Les broutards ont reçu une ration à base de maïs ensilage et de céréales produits sur l'exploitation. Nous avons juste acheté un aliment complémentaire. En contrepartie, nous avons moins nourri le reste du troupeau, qui aurait pourtant mérité plus de soins vu la qualité des fourrages. Et en laissant plus de bovins à l'extérieur, nous avons dégradé un peu plus nos sols.» Pour le reste des broutards, Denis et Laurent ont profité d'une petite embellie des cours à la fin de janvier. Ils les ont vendus à 2,25 €/kg, un tarif correct. Huit jours plus tard, les cours rechutaient à 2 €/kg. «Aujourd'hui, nous avons vacciné le cheptel reproducteur et les broutards prévus à la vente pour septembre. Les vaccins ont été disponibles à la fin de mai. Nous n'avons eu qu'un seul cas de FCO sur une vache qui s'est très bien remise. Il reste à voir les conséquences sur les vêlages de l'an prochain.» |
Témoingnage: JEAN-BAPTISTE SOUFFLET, naisseur-engraisseur à Sempigny (Oise) «Après deux ans de galère, la vaccination redonne espoir»«Voilà deux ans que nous sommes dans une zone touchée par la FCO. La première année, en 2006, la maladie n'a pas eu d'impact sanitaire sur notre élevage. Alors, pourquoi se protéger contre elle?» En 2007, la circulation virale n'a repris officiellement qu'en fin d'été. Le printemps a pourtant apporté son lot de soucis: des problèmes pulmonaires difficiles à soigner. Les veaux au pis restaient maigres et toussaient. La pression monte d'un cran à l'automne. «Normalement, les génisses commencent à vêler entre la fin de septembre et le début d'octobre. Là, j'ai eu une dizaine de prématurés, des mort-nés et de veaux mourant dans les vingt-quatre heures après leur naissance. Nous avons réussi à en élever un certain nombre, mais avec beaucoup de difficultés. C'est à ce moment-là que nous avons réalisé les prises de sang et mis en évidence la FCO au sein de l'exploitation.» Les génisses, et les vaches dans une moindre mesure, ont produit peu de lait. La croissance des veaux en a pâti. Dans certains cas, il a même fallu retirer le veau et le mettre sous une femelle qui avait perdu le sien. Et puis il y a eu un lot de six animaux nés en janvier et février. «Je me suis battu pour les élever, car ils ne prenaient pas le pis. J'ai dû leur tenir le trayon dans la gueule pendant au moins deux à trois semaines et toujours du même côté de la vache. Avant leur sevrage, il y a une semaine, ils avaient encore besoin que leur mère se présente du bon côté, sinon ils étaient incapables de téter.» Deux d'entre eux sont en pâture sur une petite surface. Les quatre autres sont encore en stabulation. Ils ne sont pas aveugles, mais se cognent dans le mur régulièrement. Ils disposent de seaux d'eau posés par terre, car ils sont incapables d'utiliser les abreuvoirs automatiques. «Ils ne m'ont pas coûté cher en vétérinaire, mais en temps. Reste à savoir quelle sera leur valeur une fois engraissés.» Sur les 170 vêlages prévus,une dizaine de vaches étaient vides. Une douzaine d'entre elles sont en train de vêler, alors qu'elles faisaient partie du lot qui a mis bas en novembre et décembre 2007. Au total, Jean-Baptiste Soufflet a perdu huit vaches, un taureau et une quinzaine de veaux. Il juge les pertes sur sa troupe de 250 brebis de race texel moins sévères, du moins jusqu'à l'automne de 2007. «D'habitude, je tonds au début de juillet. L'an dernier, j'ai dû différer l'opération en août. Les problèmes ont commencé peu de temps après, en septembre, trois semaines avant la mise en lutte. Je pense que la laine a protégé les animaux du moucheron.» Bilan: quatre béliers morts, trente brebis et une vingtaine d'agneaux. «Nous avons désinsectisé les moutons jusqu'à l'hiver. J'étais très inquiet des conséquences de la FCO sur les résultats de la lutte.» Finalement, la fécondité a été correcte et les agneaux étaient vigoureux. «J'étais le premier chez mon vétérinaire à l'arrivée des vaccins», poursuit Jean-Baptiste, qui souhaitait vacciner toutes les femelles pleines. Pari réussi avec les vaches et les brebis, mais pas avec les génisses. «Je tends le dos en espérant qu'elles aient acquis une immunité naturelle, vu la sévérité de l'attaque subie en 2007.» La vaccination a débuté à la fin d'avril. Elle s'est étalée sur un mois. «Nous avons commencé par les moutons, dont j'ai décalé la tonte comme l'an dernier à la mi-août. J'ai quelques craintes pour les agnelles, que j'espère vacciner une fois que je les aurai triées.» La vaccination des 150 vaches, des taureaux et des brebis a nécessité entre trois et quatre jours. La facture s'élève à 4,50 € par vache dans le plus petit lot, et 2,50 € dans le plus grand pour l'acte de vaccination seul. «J'espère qu'il y aura bien une prise en charge, au moins partielle. Sur le plan sanitaire, je suis plus optimiste que l'an dernier. Je n'ai rien constaté d'inquiétant depuis le début de l'été. Heureusement, car on ne peut pas se lever plusieurs années de suite en se demandant quelle catastrophe va surgir!» |
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